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Pascal PETIT

Collège des personnalités qualifiées

J’ai 54 ans, je suis réalisateur de documentaires TV après avoir été longtemps rédacteur en chef d’émissions comme « Vie Privée, Vie publique » avec Mireille Dumas, « En Aparté » avec Pascale Clark ou « Revu et Corrigé » avec Paul Amar. J’ai toujours aimé travailler sur les émissions de témoignages et d’interviews intimistes et j’ai beaucoup appris sur le montage avec Mireille Dumas. Ensuite, j’ai eu envie d’évoluer. Les documentaires m’ont permis de développer des projets plus personnels comme « Du rejet au Refuge » que j’ai co-réalisé en 2014 avec Sonia Rolland et « Mon enfant est homo », diffusé fin 2019 sur France 5. J’ai l’immense privilège de réaliser bénévolement les spots du Refuge depuis 6 ans. Je dis « privilège » parce que je suis confronté à des témoignages et de situations que je n’aurais peut-être jamais connus dans le cadre de mon métier. Les jeunes du Refuge que j’ai pu interviewer m’ont beaucoup appris sur le pardon et sur la résilience. Leur détermination et leur force m’impressionnent terriblement.

Comme beaucoup, j’ai entendu parler du Refuge pour la première fois en 2013 au moment du débat sur la loi sur le « Mariage pour tous ». A l’époque, la parole s’est libérée dans les familles, chez les enfants comme chez les parents, et paradoxalement, de plus en plus de jeunes se sont fait virer de chez eux. J’ai deux enfants de 25 et 22 ans (je suis resté marié 13 ans avec leur mère et aujourd’hui je suis remarié avec un homme) et je n’ai jamais compris comment on pouvait mettre son enfant dehors du jour au lendemain, prendre le risque de ne plus jamais le revoir, et lui faire courir un vrai danger en le livrant à la rue. Déjà à l’époque, je trouvais le travail du Refuge remarquable et exemplaire. Tendre la main à ces jeunes en errance. Une démarche humaniste et fraternelle qui correspondait à mes valeurs. Et puis le « contrat » avec les jeunes me paraissait simple, en tout cas simple à énoncer : héberger et accompagner. Donc protéger.

En 2013, j’ai contacté Nicolas Noguier et je lui ai dit : « je ne peux pas rester sans rien faire, je veux aider le Refuge, j’aimerais devenir bénévole mais avec mon métier aux horaires un peu chaotiques, c’est compliqué, je ne sais pas comment m’y prendre… » Il m’a tout de suite répondu : « Fais ton métier, tourne les spots du Refuge, réalise les films qui vont nous permettre de mieux faire connaître le Refuge et de lancer des appels aux dons ». J’ai dit : « banco ! » Et en 6 ans, on a réalisé plus de 10 films ensemble. La confiance de Nicolas me bouleverse toujours autant qu’il y a 6 ans. Il a souvent une intuition d’avance, il a des idées de films très en amont, il me donne un brief, une feuille de route et ensuite, il me laisse réaliser le film que j’ai en tête. Celui que nous avons réalisé en 2020 sur les interventions en milieu scolaire (et qui sera dévoilé après l’été), il m’en a parlé pour la première fois il y a plus de 3 ans !

C’est une évolution logique parce que depuis 2003, le Refuge s’est enraciné dans le paysage, il s’est institutionnalisé : les pouvoirs publics font de plus en plus appel à lui pour gérer des problématiques délicates que seul Le Refuge peut gérer sur le terrain parce qu’il a cette expérience incomparable. Je pense au lieu de vie ouvert spécialement pour les jeunes mineurs ou la maison ouverte pour les jeunes migrants LGBT. Il fallait accompagner cette institutionnalisation par une évolution de la structure en Fondation, plus pérenne et plus solide qu’une association. Pour nous tous, c’est une manière de changer de « braquet » et d’ouvrir des perspectives nouvelles…

Les perspectives sont immenses pour la Fondation Le Refuge : devenir un acteur encore plus incontournable de l’action sociale en France. Pas seulement au sein des associations LGBT, mais au delà. Je suis frappé de voir qu’on fait de plus en plus appel à La Fondation Le Refuge pour participer à des réunions au plus au niveau organisées par les pouvoirs publics, aux côtés de structures aussi connues et reconnues que la Croix Rouge ou le Secours Populaire. C’est une forme de reconnaissance pour tout le travail accompli.

Devenir administrateur de la Fondation Le Refuge, c’est participer à la réflexion stratégique, c’est imaginer ce que sera Le Refuge dans 15 ou 20 ans, et réfléchir aux moyens d’assoir sa solidité et son ancrage au sein de la société française. Nous le devons aux jeunes qui passent par Le Refuge. Il faut pérenniser cette structure, ne pas prendre le risque qu’elle puisse un jour ne plus exister. Dans ce cadre, je continuerai aussi à réaliser les films d’appels aux dons du Refuge.
Réfléchir à demain, c’est aussi penser à l’action en faveur des jeunes migrants LGBT. C’est un volet important du développement de la Fondation. Je serai un administrateur attentif mais bienveillant, conscient de la chance qui m’a été donnée de figurer aux côtés des 14 membres du CA que je connais bien pour la plupart. Que des gens « bien », tout simplement.

Le plus marquant, c’est évidemment la gestion de la crise sanitaire liée au coronavirus. La gestion du confinement par les équipes de terrain du Refuge a été remarquable. Salariés et bénévoles se sont mobilisés sans compter pour sécuriser les jeunes. Et chaque jeune a pris conscience de l’importance qu’il avait pour l’ensemble de la structure. Chaque jeune, où qu’il soit hébergé en France, était notre priorité. Les bénévoles comme les salariés ont pensé aux jeunes avant de penser à eux-mêmes. Et franchement, c’est dans ces moments là qu’on éprouve la solidité d’une organisation comme la nôtre. Les jeunes eux-mêmes ne s’y sont pas trompés : leurs messages video de remerciements étaient plus touchants les uns que les autres…

Ce qui frappe tous les jeunes du Refuge, c’est le regard des bénévoles et de salariés quand ils arrivent pour la première fois. Ils le disent tous : on ne se sent pas jugé, ni dévisagé, on peut être soi-même, sans avoir à affronter un regard réprobateur… C’est nouveau pour eux qui ont toujours été humiliés ou harcelés, avant d’être rejetés par leurs familles. C’est un autre regard qui est porté sur eux et sur leur vie. Une main tendue qu’ils ont parfois du mal à saisir au début. Parce qu’ils ont trop manqué d’amour.

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